
Délicatement, tu te vides de toute pensée. Tranquillement, tu n’es rien. C’est si doux, si doux. Ce saut dans le néant. Mais la vieille à tes côtés refuse de se taire. Elle parle, parle et dit
Je ne sais pourquoi mais plus personne ne bavarde avec moi. Les gens oublient que j’existe.
Toi, tu désires le contraire exactement.
C’est ta peau sans doute qui t’en empêche. Une peau souple et soyeuse, si douce à caresser.
C’est ce qu’ils te disent.
Et ton jeune âge.
Sur toi, tu souhaites faire naître des anciennes traces de vie, délinéer ton corps en une courbe tremblante, ramollir les chairs, briser le cristallin de tes yeux, étouffer les souffles et les bruits qui se nichent au creux de tes oreilles.
Un matin, il faudra bien qu’un immense couvercle blanc s’abatte sur ta mémoire. Il sera lourd et asphyxiant, ce sera bien, tu penses, assise à côté de la vieille qui parle, parle et dit
Je ne sais pas pourquoi mais plus personne ne bavarde avec moi.